La traçabilité

Extrait de l'infolettre du 26 mars 2024.

Une des premières choses que j'ai fait dans le cadre du Parcours Écoresponsabilité en métiers d'art a été de commencer à investiguer la provenance des matières premières que j'utilise. Comme céramistes, nous avons la chance d'avoir un contact directe avec la « Terre ». Cependant, de l'extérieur, je trouve qu'il est facile d'avoir une vision idéalisée et très romantique de la chose.

Le fait est que, à moins d'extraire soi-même son argile dans la nature, les « argiles » que nous utilisons sont en réalité des pâtes céramiques, soit des mélanges de différentes matières premières qui sont extraites de mines ou de carrières... à travers le monde.

L'avantage de ces pâtes céramiques commerciales est de pouvoir ainsi obtenir une matière qui soit consistante d'une « batch » à l'autre, en plus d'économiser beaucoup de temps aux artisan.e.s. Le gros désavantage est que comme céramistes, nous sommes dépendants de l'industrie et nous ne sommes jamais à l’abri d'une hausse spectaculaire du prix de certaines matières premières, ou de la pénurie de d'autres. L'an dernier nous avons connu les 2...!

Et il n'y a aucun doute que comme nous utilisons aussi certaines matières premières qui seront très en demande avec la transition énergétique, nous serons certainement affecté par une hausse importante du coût de ces dernières. Et comme nous exploitons ces ressources plus rapidement qu'elles se renouvellent, nous verront certainement l'épuisement de certaines matières dans les années à venir.

De plus, l'industrie minière n'est pas toujours très transparente quant à ses pratiques, à la provenance des matières dont elle fait l'extraction et surtout des conditions dans lesquelles les matières sont extraites et transformées. Certaines matières peuvent être extraites à un endroit, raffinées à un autre, puis envoyée ailleurs encore pour être distribuées... Et comme ces matières prennent des milliers d'années à se renouveler dans la nature, il est primordial que l'extraction des matières premières soient faites de manière à respecter l'environnement... et les communautés.

Et c'est sans parler des matières qui ne se retrouvent pas tel quel dans la nature et qui passent par des processus énergivores et parfois polluants pour se rendre jusqu'à nous...

Bref! Il s'agit d'un sujet complexe et mes recherches sont loin d'être terminées. Cependant, je suis arrivée à tracer la provenance de la majorité des matières premières qui entrent dans la composition des argiles et des glaçures que j'utilise. J'ai été très heureuse de constater que la très grande majorité des matières composants ma principale argile de tournage et mes glaçures seraient extraites aux États-Unis. Il demeure que pour l'instant, à cause d'un manque de transparence de certaines compagnies de l'industrie minière, je n'arrive pas à déterminer avec certitude la provenance de certaines matières premières. Je poursuis toutefois mon investigation afin d'obtenir des réponses.

J'aimerais beaucoup travailler avec des matières plus locales, québécoises, ou même canadiennes, cependant les alternatives directes n'existent pas toujours.

Chose certaine, je souhaite explorer différentes avenues qui me permettraient de limiter l'extraction de matières vierges pour ma production, en plus d'expérimenter avec de l'argile locale. La bonne nouvelle, c'est que des alternatives existes, et je serai très heureuse de vous en parler davantage lorsque j'aurai amorcé des recherches concrètes de ce côté ;)